TISSU - Étoffes et Kimonos
C’est un rectangle de tissu, plié par le milieu. Deux larges manches dans lesquelles les bras se glissent, et une ceinture nouée au dos. De cette parure ancienne et minimaliste, le Japon a fait une tenue de renommée mondiale, et toujours moderne : le kimono.
Son nom simple – la chose, mono, que l'on porte, ki – est en même temps riche de sens, et la complexité du kimono réside dans ce dialogue permanent entre dépouillement et apparat. Les métiers du tissu artisanal en ont fait un langage, chargé au fil du temps de mille nuances par lequel s’expriment le tissage, la broderie, la teinture et les matières.
Revêtir un kimono est aussi une expérience à s’offrir lors d’un voyage. Une expérience qui permet de se sensibiliser à l’art de ses motifs (liés aux saisons) et couleurs (liées à l’âge), d’observer la manière dont on noue l’obi (ceinture) et de réaliser que le port du vêtement traditionnel japonais implique une posture et une gestuelle particulières.
FIBRES : L’écorce de glycine est la matière première de l’ancêtre, dépouillé, du kimono : le kosode (« petites manches »). D’elle, on tire encore le plus ancien tissu du pays, appelé fujifu, dans de vieilles fermes de Yushisha (préf. de Kyoto). Les fibres d’orme, ou de saule sont tissées par les Aïnous de Nibutani (préf. de Hokkaido) qui portent toujours la robe traditionnelle attushi.
SOIE : Sa production complexe est longtemps restée l’apanage de la Chine et du Japon, où elle a transformé le kimono en un objet précieux, une parure parfaite, au luxe codifié, ciselée de savoir-faire : ceux notamment des tisserands de Yuki (préf. d'Ibaraki et de Tochigi), ou des soieries anciennes de l’île reculée d’Oshima (préf. de Kagoshima). La soie permet au kimono broderies et jacquard (dessins ou effets de relief) dont raffolait la cour de Heian (794-1185), et des teintures luxueuses élaborées à la main, à Kyoto (Kyô yûzen), Kanazawa (Kaga yûzen) et Tokyo (Edo komon). On la retrouve dans la confection d’accessoires venant compléter le port du kimono : l’obi, les chaussettes tabi et le furoshiki (baluchon).
COTON : Simple et résistante, la ouate démocratise à l’époque Edo (1603-1868) le kimono léger – ou yukata – toujours très porté de nos jours et popularise sa teinture : à l’indigo, par nœuds shibori, ou au pochoir de papier… Les kasuri, étoffes teintes à motifs simples, ont donné naissance à des traditions précieuses à Kurume (préf. de Fukuoka) et Fukuyama (la bingo kasuri, préf. de Hiroshima). L’Iyo kasuri est tirée d’un coton de grande qualité, qui emprunte le nom de sa ville d'origine, Imabari (préf. d’Ehime) : c’est là qu’on fabrique les plus célèbres serviettes et tenugui (lingettes aux usages multiples) du Japon.
EN MODE KIMONO
La couture contemporaine n’est pas insensible aux charmes de l’ancien. Le papillon, signature de Hanae Mori, est ainsi tiré d’un motif tissé autrefois, et Kansaï Yamamoto a trouvé dans les costumes du kabuki les extravagances dont il habillait David Bowie. Chez Issey Miyake, la coupe du kimono inspire des robes et des manteaux, et le métier à tisser se mue en un laboratoire où le dessin devient un pli. Aujourd’hui, Mame Kurogouchi utilise la soie japonaise sous des formes inspirées de l’emballage furoshiki, ainsi que le brocart et les techniques sashiko (tissu ouaté et brodé) et sakiori (empiècement d’étoffes), dans ses créations.
Petite ville en bordure de la mer Intérieure, Kurashiki est le berceau d’un artisanat moderne : celui du denim japonais. Ses ateliers, répartis dans le quartier de Kojima, produisent les jeans les plus solides du Japon et les plus renommés chez les couturiers du monde entier.
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